Vos parents interviennent dans votre relation avec lui, avec elle

Les relations entre tous les frères et sœurs sont loin d’être un long fleuve tranquille. Disputes et chamailleries succèdent à des moments de belle complicité ou de franche rigolade. Il peut y avoir plus d’affinité entre deux, plus de rivalité entre deux autres,… Tout cela se passe avec, bien sûr, des interventions des parents, mais quand même dans une certaine liberté qui permet à chacun d’exprimer des élans d’agressivité ou de tendresse, de chercher à être plus fort que l’autre, de faire mal puis de s’excuser, de consoler ou de taquiner.

Vous n’éprouvez sans doute pas cette liberté avec votre f/s handicapé. Vos parents interviennent souvent. Ils prennent sa défense, vous demandent de vous en occuper ou de le laisser tranquille. Bref, ils vous donnent leur avis sur la manière dont vous devriez vous comporter avec lui. Et vous, vous avez l’impression qu’ils ne vous font pas confiance, qu’ils vous en demandent trop, ou qu’ils sont trop injustes envers vous…

Il est douloureux pour les parents de constater qu’un de leurs enfants est plus fragile que les autres et leurs diverses interventions vont souvent dans le sens d’une atténuation de ces différences. En se mettant de son côté, ils tentent de protéger le plus faible et freinent un peu la suprématie des autres.

Et puis, des risques d’incident peuvent renforcer cette situation. Une petite sœur curieuse pourrait débrancher un appareil médical. Un grand frère attentionné pourrait donner un aliment qui ne convient pas. Un mouvement d’agressivité peut avoir des conséquences imprévisibles. Un coup de main à certains moments peut être absolument indispensable…

Ces interventions vous protègent aussi d’un sentiment de culpabilité face à des actes que vous auriez commis… ou face à une indifférence dans laquelle vous vous seriez isolé.

Lucia :

Ca m’énerve quand il me frappe et que je ne peux pas le frapper parce que sinon c’est moi que mes parents punissent. (92)


Gaston :

Moi ça me rend dingue qu’il fasse toujours la victime… et qu’il fasse des caprices. Mes parents ils sont toujours de son côté. (93)


Luciano :

Moi ça m’énerve qu’il touche à mes affaires, entre dans ma chambre, qu’il sorte tout. Ils ne le punissent pas. On dirait qu’il est le roi. (94)


Andrea :

Une fois, j’étais en train de jouer à le poursuivre. Je devais l’attraper et le soulever. Il s’est cogné à une porte et se l’est prise. Et boum ! Ils ont rejeté toute la faute sur moi. Ce n’est pas bien ! (95)


Julien, 19 ans, frère de Guillaume, 15 ans, atteint de la myopathie de Duchenne, et de Pauline, 17 ans :

Je reste souvent avec lui pour ses soins, mais il demande beaucoup d’énergie et il me fatigue, donc je râle. Mes parents me rappellent que je ne dois pas lui montrer que je suis énervé. Ils ne me demandent pas de m’occuper de mon frère, mais je sais que ça les décharge et qu’ils ont besoin de se vider l’esprit, de se soulager, ne serait-ce que pour un week-end. (…) J’ai certainement grandi trop vite en m’occupant de mon frère, mais aujourd’hui nous sommes très complices. (97)


Laurent, 10 ans :

Sous prétexte de nous protéger, ils nous ont empêchés de devenir frères. Comme ça, ma mère a pu garder tout son pouvoir sur son pauvre petit garçon handicapé et a pourri ma vie et celle de mon frère en lui faisant croire que, sans elle, il ne pourrait ni vivre, ni se défendre. (98)